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auquel je viens de lancer un si fougueux anathème. Je l’habite pour un temps, afin de me confirmer dans la haine qu’il m’inspire… Et à propos, vous a-t-on jamais raconté l’histoire de Maule-le-sorcier, l’histoire de ses démêlés avec un de vos ancêtres, je ne sais lequel ?

— Oui vraiment, dit Phœbé ; mon père me l’a racontée il y a longtemps, et dans le cours du mois que je viens de passer ici, ma cousine Hepzibah m’en a régalée deux ou trois fois. Elle semble croire que tous les malheurs des Pyncheon datent de cette querelle avec « le sorcier, » comme vous l’appelez… Et vous, monsieur Holgrave, vous avez l’air de partager cette opinion ?… Comment ne pas s’étonner que de pareilles absurdités trouvent créance chez vous, quand on vous voit repousser tant et tant d’hypothèses bien autrement probables !

— Je le crois, en effet, dit l’artiste très-sérieux : non pas, cependant, comme une superstition, mais comme chose prouvée par des faits indubitables, et pouvant servir de démonstration à une théorie. Voyez plutôt : sous ces Sept Pignons que nous voyons maintenant — et que le colonel Pyncheon avait élevés pour abriter ses descendants, toujours heureux et prospères, jusqu’à une époque bien postérieure à celle où nous vivons ; — sous ce toit septuple, pendant un laps de temps qui touche à trois siècles consécutifs, il n’a cessé d’y avoir remords de conscience, espoirs déçus, luttes entre proches, misères de toute espèce, un trépas étrange, des soupçons mystérieux, une flétrissure inexprimable ; — et tous ces malheurs, ou la plupart d’entre eux, j’en pourrais trouver l’origine dans