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mille influences morbides ; il n’était pas sain de respirer uniquement son atmosphère lourde et malsaine. Pour s’y être emprisonnée trop longtemps, livrée à une seule série d’idées, à une seule affection, à un seul ressentiment, Hepzibah, nonobstant ses précieuses qualités, y était presque devenue folle. L’inertie de Clifford, — on le croira facilement, — le rendait incapable d’aucune action morale sur les êtres de son espèce, si intimes, si exclusives que fussent leurs relations avec lui. Mais il existe entre les créatures d’ici-bas, entre les différentes classes de la vie organisée, une sympathie, un magnétisme plus subtils et plus universels que nous ne le croyons. Une fleur, par exemple, — Phœbé avait pu l’observer elle-même — commençait à se flétrir dans la main de Clifford ou d’Hepzibah bien plus tôt que dans la sienne ; et en vertu de la même loi, si elle eût consacré chaque heure de sa vie à récréer de ses parfums deux esprits malades, sa jeunesse épanouie se serait flétrie et fanée bien plus vite que sur un coeur jeune et heureux. Il lui fallait, sous peine d’une décadence rapide, céder de temps en temps à ces soudaines inspirations qui tantôt l’attiraient vers les prairies au delà du faubourg, tantôt parmi les brises marines courant sur le rivage, tantôt à quelques-uns de ces délassements pleins d’attraits pour les jeunes filles de la Nouvelle Angleterre, — une lecture de métaphysique ou de philosophie, — un panorama de quelques mille mètres, — un concert de virtuoses baroques, — et surtout ces visites aux magasins de la ville, où, pour acheter un ruban, on fait mettre sens dessus dessous quelques douzaines de « rayons. » Sans toutes ces distractions et ces demi--