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faisaient cercle autour de lui, et de la porte du magasin d’Hepzibah, porta bientôt ses regards sur la Croisée en ogive, d’où Clifford et Phœbé le regardaient ; de temps en temps aussi, retirant sa toque de montagnard, il adressait aux assistants un profond salut, suivi d’une cabriole, et parfois sollicitait directement la générosité du public par un geste expressif de sa petite main noire. L’expression ignoble et basse, mais singulièrement humaine, de sa physionomie contractée, — son regard à la fois suppliant et rusé, — son énorme queue (qui ne pouvait jamais se dérober, ainsi que l’eût voulu la décence, sous sa tunique de tartan) et le caractère diabolique que cet appendice lui donnait, — faisaient de ce petit animal la meilleure image possible d’un Mammon de bas étage : et nul moyen de satisfaire complétement l’avide petit démon. Phœbé lui lança une pleine poignée de pence qu’il se hâta de ramasser avec un empressement joyeux pour les mettre sous la bonne garde de son jeune patron ; après quoi recommença toute une série de pantomimes, marquées au coin d’une-insatiable mendicité.

Maint et maint passant se contentait de jeter un regard sur le singe, et de poursuivre sa route, sans se douter qu’il avait là, sous les yeux, la fidèle image de sa propre condition morale. Mais Clifford, créature d’un autre ordre, après avoir pris à la musique un plaisir d’enfant et souri aux figurines que cette musique faisait mouvoir, fut tout à coup froissé par l’horrible laideur, intellectuelle et physique, de ce petit nain à longue queue dont nous venons de raconter les faits et gestes. Presque aussitôt ses larmes coulèrent, en vertu d’une défaillance dont tout homme est suscepti-