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du vase de cristal où elle avait disposé ses fleurs. Le salut qu’il lui adressa, si imparfait, si ébauché qu’il fût d’ailleurs, avait en lui comme un germe de grâce indescriptible, trop fugitive pour être remarquée au moment même, mais dont l’arrière souvenir, s’imposant à la mémoire, semblait transfigurer l’homme tout entier.

« Mon cher Clifford, dit Hepzibah qui lui parlait comme s’il se fût agi de calmer quelque bouderie d’enfant gâté… Je vous présente notre cousine Phœbé, — la petite Phœbé Pyncheon, — l’unique enfant d’Arthur, vous savez bien ?… Elle vient de la campagne pour passer quelque temps avec nous et pour animer un peu notre vieille maison devenue si triste.

— Phœbé ? Phœbé Pyncheon ?… la petite Phœbé, répétait le nouveau venu qui formait à peine ses mots, s’exprimant avec une peine étrange… L’enfant d’Arthur !… Ah mais, j’ai donc oublié ?… Peu importe !… Qu’elle soit la bienvenue !

— Allons, cher Clifford, prenez ce siége, dit Hepzibah qui le conduisit à sa place ; et vous, Phœbé, veuillez baisser un peu le rideau… Déjeunons, à présent : il est bien temps. »

De la place qui lui était assignée, le convive jetait autour de lui des regards surpris. Il faisait évidemment effort pour se pénétrer de ce qu’il avait sous les yeux et s’assurer qu’il était bien là, dans cette salle au plafond bas, aux lambris de chêne, non dans un autre endroit, qu’une longue habitude avait pour ainsi dire stéréotypé devant son regard. Mais c’était demander à sa pensée un trop grand effort : bientôt lasse elle le quittait, ne laissant devant cette table qu’un corps en