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Bien que la visite du lieutenant-governor fût une des gloires prévues de cette journée mémorable, il était descendu de son cheval, et après avoir aidé sa femme à quitter la selle, il avait même franchi le seuil du colonel sans autre salut que celui du domestique en chef.

Ce personnage, — vieillard à tête grise dont les dehors étaient les plus respectueux du monde, — jugea indispensable d’expliquer que son maître n’avait pas encore quitté le cabinet de travail où il s’était retiré depuis près d’une heure en témoignant le désir de n’être dérangé sous aucun prétexte.

« Vous voyez bien, camarade, dit le Haut-Shériff du comté, prenant à part le fidèle domestique, qu’il ne s’agit de rien moins que du Lieutenant-Gouverneur. Appelez immédiatement le colonel Pyncheon !… Je sais qu’il a reçu ce matin des lettres d’Angleterre, et qu’il a pu passer une heure à les parcourir sans trop prendre garde au temps qui s’écoulait. Mais il vous en voudrait, j’en suis certain, si vous le laissiez à son insu négliger les égards qui sont dus à l’un de nos principaux fonctionnaires, à celui qui, en l’absence du Gouverneur représente, peut-on dire, le roi Guillaume… Avertissez votre maître à l’instant même ! »

— Sauf votre respect, je n’en ferai rien, répondit cet homme très-perplexe, mais avec une timidité qui dénonçait éloquemment le despotisme domestique du colonel Pyncheon. Les ordres de Monsieur étaient tout à fait stricts et comme votre Honneur doit le savoir, il ne laisse rien à l’interprétation de ceux qui le servent… Ouvre cette porte qui voudra !… Je ne m’en chargerai pas, dût le Gouverneur lui-même m’en donner l’ordre formel.