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bref tout ce qu’il y avait d’aristocratie dans la ville ou le comté, se pressaient sous cette porte en arceau. Les classes plébéiennes y affluaient aussi, sans plus de gêne et bien autrement nombreuses. Sous le vestibule, cependant, se tenaient deux domestiques qui tantôt dirigeaient les convives du côté de la cuisine, tantôt les menaient vers les appartements de cérémonie, gardant à tous un accueil hospitalier, mais ayant soin de maintenir la différence des rangs. Il était d’ailleurs facile, à cette époque, de discerner le gentleman du travailleur. Les vêtements de velours, sombres, mais riches, les cols et les manchettes aux plis empesés, les gants chargés de broderies, les barbes vénérables, le port majestueux des hommes investis d’une autorité quelconque, ne permettaient pas de les confondre soit avec le laboureur habillé de cuir, soit avec l’ouvrier habillé de bure qui se glissaient, ébahis, dans cette maison à la construction de laquelle tous deux peut-être avaient mis la main.

Quelques-uns des visiteurs les plus pointilleux commençaient pourtant à s’inquiéter d’une circonstance passablement malheureuse. Le maître de cet hôtel imposant, — renommé pour la courtoisie scrupuleuse et quelquefois gênante qu’il déployait ordinairement, — aurait dû se trouver sous le vestibule et offrir la première bien-venue à tous les éminents personnages accourus avec le désir de lui faire honneur. Pourtant il était encore invisible. Ses hôtes les mieux traités ne l’avaient pas aperçu. Pareille négligence, de la part du colonel Pyncheon, devint plus difficile à expliquer lorsque le second dignitaire de la province vint à paraître sans obtenir un accueil plus cérémonieux.