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va mêler cet incident aux restes de ses traditions, et prétendre que ses poules ont reconnu en vous un membre de la famille Pyncheon.

— Le secret, dit Phœbé en souriant, c’est que j’ai appris à parler leur langage.

— Oui-da, répondit le jeune homme ; mais ces aristocratiques animaux ne s’abaisseraient pas à comprendre l’idiome vulgaire des basses-cours de ferme. Je me range donc à l’avis de miss Hepzibah ; car, n’est-il pas vrai, vous êtes une Pyncheon ?

— Je m’appelle Phœbé Pyncheon, effectivement, dit la jeune fille avec une certaine réserve (elle devinait bien que sa nouvelle connaissance devait être le photographe, et la vieille demoiselle en lui parlant de ses propensions à l’illégalité, lui en avait donné une idée assez fâcheuse). Je ne savais pas que le jardin de ma cousine Hepzibah fût soigné par un autre qu’elle.

— Oui, reprit Holgrave, je pioche, je bêche, je sarcle cette vieille terre, mais par manière de passe-temps. Mon vrai travail, si tant est que j’en aie un, s’exerce sur une substance plus légère. Je fais des portraits, et mon collaborateur est le soleil ; pour balancer les éblouissements du métier, j’ai obtenu de miss Hepzibah qu’elle me laissât habiter un de ces sombres pignons… Toutes les fois que j’y entre, c’est comme si je me bandais les yeux… Aimeriez-vous, par hasard, à voir quelques-unes de mes productions ?

— Vos daguerréotypes ? demanda Phœbé avec moins de réserve, car nonobstant ses préjugés défavorables, elle sentait sa jeunesse attirée par celle du nouveau venu… Je n’aime pas beaucoup les portraits de ce genre… Ils durcissent les traits et leur donnent une