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286 LITTIERATURE ITALIENNE poéme, que des doutes, des craintes, dev scrupulcs l’assaillirent, scrupules de chrétien autant que d,8I`liS1QC : cette épopée religieuse n’était-elle pas trop profane? N`allait-elle pas préter le flanc aux critiques des lettrés et des théologiensi’ Pour sauver de la censure qu’il redou- tait les épisodes romanesques, ou il avait mis le meilleur de lui-méme, le Tasse rédigea une longue interprétation allégorique de la Jérusalcm; en outre, il voulut sou- mettre son muvre chant par chant a la revision des plus fameux savants de Rome, de Padoue et de Florence. Ceux-ci, prenant leur tache trés au sérieux, n°épar- gnérent pas les observations; quelques·uns allérent jusqu’a conseiller une refonte complete du poéme, de facon a en faire une oeuvre de pure édification, propre a charmer les longs loisirs des nonnesl Le Tasse, tiraillé entre ces critiques, qui répondaient a ses préoccupations iutimes, et sa tendresse pour les charmantes créations de son génie, se débattit pendant toute l`année 1576. Cette malheureuse consultation, qu'il avait eu l’impru- dence de provoquer, faillit avoir pour résultat la publi- cation du poéme contre sa volonté, grace aux nom- breuses copies qu°il en avait lui-méme fait cireuler; il nc lhllut pas moins que l`intervention menaqante du duc pour écarter ce danger. Au milieu de cette perpétuelle surexcitation, des crises 'plus graves se manifestéreut : le 17 juin 1577, tandis qu’il exposait, pour la centiéme fois, h la princesse Lucréce l’histoire de ses malheurs et des persécutions dont il était l’objet, il se crut épié par un doinestique, et se jeta sur lui, lui portant un coup de couteau. Ou l`enferma, d°abord dans une chambre du palais, puis dans un couvent; mais il s’enl`uit, et voulut revoir Sorrento, ou était rcstée sa sceur Cornelia. La paix de