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cement cela s’accepte ; au milieu, c’est fâcheux et, à la fin, c’est insupportable.

L’Aiglon me paraît une erreur énorme à travers laquelle étincellent des traits de talent exquis.

Parmi son fatras obscur
Souvent Brébeuf étincelle.

Que M. Rostand prenne garde ; enflure et précieux, il y a bien un peu de Brébeuf dans son affaire. Il devra se défier de sa dangereuse facilité, et viser au simple. J’ai peur, du reste, qu’il soit incapable de se débarrasser de l’un et d’atteindre l’autre. Ce n’est pas dans sa nature.

Et M. Rostand n’en reste pas moins l’incomparable auteur de la merveille Cyrano. Évidemment. Dans le bagage d’un auteur il n’y a que le bon qui compte.

L’Aiglon aura du succès, un succès populaire, un succès fructueux. Malgré l’enthousiasme, que je ne songe pas à contester, de la première représentation, je doute que la faveur des connaisseurs s’attache à lui. Et, après tout, comme je puis me tromper ! Mais il n’est que le mot de Luther : « Voilà. Je ne peux pas dire autrement. Si j’erre, que Dieu me pardonne ! Amen ! »

(Journal des Débats, du 19 mars 1900).


De Gustave Larroumet (L’Aiglon).

« … Nous avions été trop indulgents et trop sévères pour L’Aiglon. Il vaut plus et mieux que Cyrano de Bergerac, auquel il fut préféré et sacrifié. L’inspiration poétique y est plus haute et moins égale, la facture dramatique plus vigoureuse et moins adroite. Au total, le progrès est grand d’une pièce à l’autre et le talent s’y élargit. L’Aiglon est long et touffu, mais comme je préfère cette prodigalité au défaut contraire : l’économie !

Improvisateur, a-t-on dit de M. Rostand, et faiseur de morceaux. Il est toujours facile de dénigrer le plus incontestable mérite en substituant à la définition de ses qualités celle des défauts qui en sont l’excès. Le vrai et le juste seraient, au contraire, de dire que, depuis Victor Hugo, nous n’avions pas eu au théâtre une