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la poésie ? Que les matériaux soient trop nombreux et trop divers, et tels que le génie seul pût les mettre harmonieusement en place, il n’empêche que l’œuvre est originale et haute, et, en ce temps de liberté, il faut accepter toutes les formes dramatiques. Ne voyons dans les animaux que des déguisements, des mannequins, bien que le poète leur ait laissé une grande part de leur existence toute animale, ce qui, probablement, a permis à la Société Protectrice des Animaux de lui décerner son grand diplôme d’honneur. La transposition est continuelle, et les allusions à tout ce qui ressortit à notre civilisation d’hommes, littérature, mœurs, histoire, sont innombrables.

Chantecler, le coq, c’est encore un Cyrano, franc et sain, courageux et qui protège. Il combattra comme lui l’ironie et tout ce qui avilit et dénature l’âme humaine. Comme Cyrano, il subit des épreuves, mais des épreuves moins extérieures. Il nous dévoile le découragement de l’artiste après l’œuvre faite, de l’artiste qui sent ou s’imagine qu’il ne pourra plus recommencer, qui doute, et, faible, demande à la femme de le consoler. Chantecler, c’est — presque — le poète-martyr. Et il représente le bon labeur, le sens de la terre et du terroir ; écoutons-le proclamer, comme seul motif de vivre,

« L’effort ! qui rend sacré l’être le plus infime »,


et encore :

« Faire tout ce qu’on peut sur la plus humble échelle »…