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du rêve et du réel ; l’état du ciel, aube ou couchant ; les malheureux de la nef, « ces dévouements actifs qui portaient le rêveur » ; le marchand, tueur d’espoir, démolisseur d’idole, avilisseur de l’idée, qu’il rend utile ; l’attente, le regard fixe et croyant de Joffroy suffisant à attirer la Princesse ; les fleurs, et jusqu’à la fenêtre : tout est symbole. Rude, c’est le poète, c’est l’âme, et Bertrand, c’est le corps, c’est la vie.

L’émotion que nous éprouvons est haute et noble. Cette œuvre, où l’on discerne l’influence de l’époque et de l’école poétique qui avait précédé, cette œuvre où il y a de la volupté et de la foi divinise presque le poète, glorifie l’enthousiasme, l’élan qui fait sortir de soi, « ce grand printemps qu’est l’oubli de soi-même » et, tout bonnement, le véritable amour. Frère Trophime nous dit :

«… L’amour est saint. Dieu le voulut.
Celui qui meurt d’amour est sûr de son salut »


et — dernier vers de la pièce —

« Oui, les grandes amours travaillent pour le Ciel ».

L’agencement scénique est toujours adroit, avec sa symétrie du lieu des actes et l’extériorité indispensable, les oppositions nécessaires de personnages, Sorismonde, la réaliste, près de la Princesse, — et Squarciafico, les revirements, et la couleur de cette Tripolitaine singulièrement civilisée, qui nous enchante. Et le virtuose du vers n’oublie pas d’insérer quelques chansons.

La pièce se trouva célébrer, idéaliser Sarah