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INTRODUCTION

INTRODUCTION

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Lorsque l’étymolog-ie est connue, le mot se rattache par formation populaire à la période du latin vulgaire ou du roman, ou il est de formation purement française. S’il remonte au latin vulgaire ou au roman, deux cas se présentent. Certains mots primitifs nous sont connus par des textes classiques, coroniQ patrem, patine, père ; hominem, homine, homme ; tahulam, tabula, table ; murum, muni, mur, etc. D’autres ont été restitués au latin populaire par induction : leporariu, léyrier ; pe trône, perron. Nous distinguons les seconds des premiers par un astérisque. Dans ces deux cas, il n’y a pas de date à fixer pour l’apparition du mot, puisqu’il a vécu sans interruption de l’origine latine à nos jours.

Quant aux mots qui sont nés, non dans la période latine ou romane, mais dans la période française, les uns sont d’origine vulgaire, formés par dérivation ou par composition populaire (comme chevalet, de cheval ; déménage ?^ déménage)] les autres, empruntés à une langue étrangère (comme escadron, de l’italien squadrone ; budget, de l’anglais budget)] d’autres enfin, d’origine savante, empruntés directement au latin, au bas latin ou au grec (comme abjection, de abjectio ; individu, de individuus ; phtisie ,

de <f6((Tt< ;), ou formés par dérivation ou composition savante selon les procédés usités en latin et en grec (comme rosacée, de rosa ; horticulteur, de hortiis et cultor ; hypertrophie, de uTTEo et Tpocpvj). Dans tous ces cas, il importe de déterminer autant que possible l’époque de l’apparition du mot dans la langue. C’est ce que nous avons essayé de faire en indiquant, à la suite de l’étymologie, l’exemple le plus ancien que nous ayons rencontré ; nous poursuivons cette enquête historique jusqu’à la fin du xvni siècle. Les mots créés au xix" siècle sont accompagnés de la mention : « néologisme ». m.

DÉFINITION

Une définition exacte doit s’appliquer au mot défini, à l’exclusion de tous les autres, et rendre raison de toutes ses acceptions. Suivant des dictionnaires autorisés, une carrière est tm lieu entouré de barrières, disposé pour des courses. Cette définition s’applique-t-elle au mot, à l’exclusion de tous les autres ? Non, car elle désigne aussi bien un cirque , un hippodrome , une arène. Justifie-t-elle les emplois divers du mot ? On dit : entrer dans la carrière, être au bout de la carrière. Or le spectateur entre dans le lieu entouré de barrières pour assister à la lutte, il n’entre pas pour cela dans la carrière. Le coureur qui est arrivé à l’extrémité du lieu entouré de barrières, n’est pas au bout de la carrière si la course consiste à faire plusieurs fois le tour de l’enceinte. Cette définition ne s’applique pas davantage au sens figuré. On dit poétiquement que le soleil poursuit, achève sa carrière :

Le dieu, poursuivant sa carrière.

Versait des torrents de lumière

Sur ses obscurs blasphémateurs ^

Comment l’astre pourrait-il, même par métaphore, poursuivre, achever un lieu entouré de barrières ?

C’est que la carrière n’est point un lieu entouré de barrières , disposé pour des courses, mais l’espace à parcourir dans une course de chars, de chevaux. Si nous substituons cette définition à la première, toutes les difficultés disparaissent. La carrière ne peut plus être confondue avec un cirque, un hippodrome, etc. 1. Lefrang de Pompignan, Ode sur la mort de J. -B. Rousseau.