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Rien n’est plus pernicieux que cet esprit ; les personnes peu éclairées n’en éprouvent que trop la contagion. Nous nous proposons de nous élever avec force contre ce goût trop répandu…

3o Les encyclopédistes ont prétendu nous donner, dans leur dictionnaire, des modèles, en même temps qu’ils ont voulu nous y prescrire des règles : il est donc tout naturel que nous examinions leur littérature… Nous pourrions mettre en fait qu’il n’y a peut-être pas, dans toute l’Encyclopédie, un seul article sur lequel nous ne pussions égayer nos lecteurs aux dépens des auteurs de ce dictionnaire, qui se donnent comme des lumières extraordinaires venues pour éclairer l’univers entier.

4o Il y a une certaine partie de la littérature de nos jours sur laquelle nous croyons devoir garder le silence, pensant qu’il vaut mieux n’en pas faire mention que d’occuper nos lecteurs à l’examen de pareils objets. Ainsi on ne trouvera pas dans notre journal ce qui concerne le théâtre actuel, et toutes ces bagatelles poétiques dont un certain nombre de jeunes auteurs font leur principale étude et que des libraires avides tâchent de répandre par toutes sortes de voies ; non plus que les romans et les petites brochures qui n’entrent que dans la bibliothèque des gens désœuvrés.


On ne saurait être plus clair, ni plus hardi ; mais, en dépit du vieil adage, la fortune ne sourit point à l’audace des Censeurs hebdomadaires. Ils reconnurent bientôt qu’ils faisaient fausse voie, et ils n’hésitèrent pas à changer de tactique. On lit en tête du 2e volume :


Le goût du public doit être la boussole des écrivains, surtout de ceux dont la pénible et délicate occupation est de rendre compte des nouveautés littéraires. Il faut se mettre dans le cas de pouvoir être lu de tout le monde. On ne parviendra à ce but désiré de ses travaux qu’en jetant un certain agrément sur les objets mêmes qui en paraissent le moins susceptibles.