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florissant. Le nombre des auteurs se multiplie tous les jours. Leurs productions, telles qu’elles soient, ont cours dans le public, et ne vont plus, comme autrefois,


Habiller chez Francœur le sucre et la canelle.


Il y a aujourd’hui mille moyens de se défaire d’un livre qui, dès le commencement de sa naissance, paraissait condamné à décorer éternellement les poudreuses tablettes d’une arrière-boutique. Auteurs, libraires, colporteurs, tous les chefs, membres et suppôts de la littérature, savent à présent de quelle manière s’y prendre pour tirer bon parti des plus minces ouvrages, et tout, jusqu’aux Ridicules du Siècle, peut trouver des acheteurs.

De tous les différents commerces, c’est celui des marchandises littéraires qui demande le plus d’industrie. Aussi voyons-nous que ceux qui se mêlent de ce négoce ont une adresse admirable pour tromper le public. Mais quels sont les stratagèmes qu’ils emploient ? C’est ce que nous allons examiner. Commençons par les auteurs.

Pour peu qu’un homme de lettres soit répandu dans le monde, il est sûr de trouver des personnes obligeantes qui lui aideront à se défaire avantageusement des plus mauvaises marchandises. D’aimables femmes se chargeront volontiers de vendre plusieurs exemplaires d’un livre qu’elles n’ont pas toujours la complaisance de lire ; et pour rendre service à l’auteur elles mettent à contribution toutes les personnes de leur connaissance. Si ces femmes sont jeunes et jolies, le débit est considérable. Les vieilles douairières, qui tiennent bureau et table de bel esprit, sont aussi d’une grande ressource. D’ailleurs, on met en campagne des amis, qui vont prôner partout l’excellence d’une brochure nouvelle, et qui déterminent quantité de personnes à courir chez le libraire pour y changer leur argent en mauvais papier.

La plupart des auteurs font le commerce en détail ; mais il s’en trouve aussi qui imitent les gros négociants et qui envoient leurs marchandises dans le pays étranger. Je connais un écrivain


Peut tous les mois, sans peiDont la fertile plume
Peut tous les mois, sans peine, enfanter un volume.