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les parties de ce programme, où Brissot se montre à découvert, ne fussent pas précisément du goût du ministère français, qu’il ne partageât pas la manière de voir de notre jeune philanthrope sur les saines doctrines qui rendent les hommes heureux, sur l’opportunité de parler des constitutions et des intérêts des peuples. C’est ce qui arriva bientôt, en effet : le ministère vit dans le nouveau Courrier une tribune dangereuse qu’il fallait abattre, et il l’abattit. Il intima l’ordre de s’en tenir aux nouvelles anglaises, et le Courrier de Boulogne redevint à peu près la plate réimpression du Courrier de Londres. Je dis à peu près, car de temps en temps il s’y glissait des articles raisonnables, — c’est Brissot qui parle, — qu’on avait soin de supprimer, ce qui procurait au public le plaisir de lire à leur place les fables de l’abbé Aubert, de mauvais vers, de méchantes épigrammes, et quelques morceaux de littérature scrupuleusement censurés.

L’emploi de Brissot, réduit ainsi à un travail purement mécanique, avait beaucoup perdu de ses charmes pour lui, et ne pouvait plus suffire à son esprit actif et novateur. Il songeait à trouver quelque autre voie plus large, quand, un beau jour, tout à coup, Swinton lui annonça leur séparation prochaine. Un nouveau projet l’avait séduit, et, pour l’exécuter économiquement, il voulait se débarrasser de Brissot. Considérant les profits immenses