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et le plaisir qu’avaient le roi et la reine à lire ses feuilles ; quelques autres craignirent de scandaliser le clergé, regardant Me Linguet comme un de ses boucliers. Bref, on finit par renvoyer la délibération au premier jour, c’est-à-dire aux calendes grecques.

Ainsi cette grosse affaire n’eut d’autre effet que de redoubler la verve et l’audace de Linguet. Le ministère alors, voyant qu’il n’y avait pas d’autre moyen d’en venir à bout, résolut de recourir à la violence : on l’attira à Paris « par une suite de trahisons », et il y était à peine arrivé qu’il fut arrêté, le 27 septembre 1780, et conduit à la Bastille.

« Le métier d’Arétin, dit Grimm en annonçant cette nouvelle, a toujours eu ses périls et ses désagréments. Le sieur Linguet, qui s’était persuadé très-sérieusement qu’il y échapperait toute sa vie, grâce à la fermeté de son caractère et à une demi-douzaine de pistolets qu’il avait grand soin d’étaler sur son bureau ou de porter dans ses poches, vient d’être mis à la Bastille. Il y a été conduit, dit-on, pour éviter tout éclat, par un de ses amis, le commissaire Chesnon, sous le prétexte d’un dîner que ce bon ami lui avait proposé dans une maison de campagne au bois de Vincennes. Le public ignore encore le véritable sujet de sa détention, mais il en soupçonne plusieurs : les impertinences débitées dans ses Annales sur le roi de Prusse, sur la con-