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tions philosophiques le lieu où il recevra son existence matérielle. Consacré à la vérité, il s’imprimera dans le puits où la perversité des hommes a forcé cette fille du ciel de se cacher.


Cette fois les Annales ne purent circuler en France qu’avec l’attache d’un censeur ; quelques numéros ne passèrent qu’au moyen de cartons ; quelques autres furent impitoyablement arrêtés à la frontière. Cependant on remarquait dans les premières feuilles de cette nouvelle série un revirement très sensible : il était évident que Linguet s’était rapproché des ministres, et, aux égards qu’il montrait pour eux, on pouvait supposer que, fatigué de sa vie errante et des persécutions qui ne lui étaient pas épargnées même à l’étranger, il n’aurait pas mieux demandé que de rentrer en France. Ce qui est certain, néanmoins, c’est que, s’il avait fait sa paix avec les ministres, il était resté en guerre ouverte avec les encyclopédistes et les économistes, avec les apôtres modernes et les journalistes légion, avec d’Alembert, Morellet, La Harpe et beaucoup d’autres, qu’il ne cessait de poursuivre de ses invectives. Nous connaissons un de ses griefs contre d’Alembert ; Morellet avait écrit contre lui une Théorie du paradoxe, « libelle qui joint à tout le fiel, à toutes les impostures dont jamais la plume d’un écrivain a pu se souiller, l’opprobre d’avoir été composé pour plaire à un ministre tout-puissant et prévenu, contre un homme irréprochable,