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chicaner, et dont il se félicite d’être débarrassé. Il se montre surtout acharné contre le Journal des Savants : « Un certain journal suranné, dit-il, appelé des Savants, a le domaine de la littérature… À Rome c’est un dominicain, grand-maître du sacré palais et grand inquisiteur, qui tue les idées. L’inquisition censoriale, à Paris, n’est pas moins redoutable, quoique exercée sans scapulaire et sans capuchon. » Bientôt même il oublia la réserve que lui imposaient les lois de l’hospitalité, et il ne craignit pas de s’attaquer au gouvernement anglais. Quelques observations malsonnantes sur la législation britannique et sur les mœurs de Londres lui attirèrent de sévères remontrances, qu’il prit très mal ; et comme il ne pouvait se déterminer à faire des concessions, surtout à l’étranger, il se décida héroïquement à repasser la mer.

Mais où trouver un asile plus commode pour ses Annales, que les puissances paraissaient unanimes à regarder comme un libelle périodique ? car il était impossible qu’il rentrât dans le silence. « Me Linguet, lit-on dans les Mémoires de Bachaumont, a d’autant plus de peine à se départir de son rôle d’Arétin moderne, qu’il l’a trouvé très-lucratif l’année dernière, et qu’une année de son journal, tous frais faits, lui a rendu 50,000 livres net. Son projet était de profiter de l’engouement général pour se faire ainsi rapidement une fortune qu’il bornait