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prendra jamais d’essayer d’y être admis ; mais je sais bien que j’y renonce de bon cœur, s’il faut absolument se charger d’un sceau particulier de probation ; s’il faut faire autre chose qu’être ferme, droit et naïf, respecter ce qui est respectable, mépriser ce qui est méprisable, dédaigner les sectes et leur fanatisme, et enfin montrer sans cesse ce que l’on a dans le cœur, mais aussi n’y avoir que ce que l’on montre.


On comprendra maintenant l’acharnement de Linguet d’abord contre la littérature, ensuite contre le barreau, et enfin contre le gouvernement, qu’il faisait complice des avocats et des gens de lettres.

Ayant inutilement tenté de se faire réintégrer sur le tableau, il se retourna vers la littérature, et se fit journaliste. Indépendamment de son goût pour la lutte, il vit dans le journal une arme pour sa rancune. Il accepta donc de Panckoucke la rédaction du Journal de Politique et de Littérature.

Le premier numéro de ce nouveau journal, connu sous le nom de Journal de Bruxelles, parut le 25 octobre 1774. Linguet le fit précéder d’un préambule curieux à plusieurs titres, et que nous croyons devoir reproduire presqu’en entier.


Le rédacteur de ce journal aurait voulu que son nom restât ignoré, du moins pendant quelque temps : le public, forcé d’apprécier l’ouvrage en lui-même, n’aurait pas été exposé au danger de se prévenir, d’une manière avantageuse ou défavorable, d’après le seul nom de l’auteur. Une méprise singulière a divulgué ce secret. Il est donc obligé d’avance d’annoncer le plan qu’il se propose de suivre, et de rendre compte des motifs qui l’ont déterminé, dans un moment de loisir sur lequel il ne devait pas compter, à un travail d’un genre absolument nouveau pour lui.