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parvint promptement Marmontel par des moyens qu’on n’a pas toujours employés après lui dans quelques ouvrages périodiques. Parler aux gens de lettres le langage de la décence en même temps que celui de la vérité ; justifier la liberté avec laquelle on observe les défauts par l’attention avec laquelle on relève les beautés ; se refuser à ces traits d’ironie sanglante, et pourtant facile, qui ne prouvent rien et qui n’éclairent personne, quoique plus amusants pour le peuple des lecteurs qu’une critique honnête et sensée ; parler le ton modéré de la raison, au lieu de consoler l’envie et de flatter la malignité ; enfin, et surtout, ne pas prostituer sa plume à l’esprit de parti : telles furent les lois qu’observa constamment Marmontel dans la rédaction de son journal. »

Marmontel lui-même nous a laissé, sur son passage au Mercure, quelques pages qui m’ont semblé mériter à plus d’un titre que nous les reproduisions  :


Si le Mercure n’avait été qu’un simple journal littéraire, je n’aurais eu, en le composant, qu’une seule tâche à remplir et qu’une seule route à suivre ; mais, formé d’éléments divers et fait pour embrasser un grand nombre d’objets, il fallait que, dans tous ses rapports, il remplît sa destination ; que, selon le goût des abonnés, il tînt lieu des gazettes aux nouvellistes ; qu’il rendît compte des spectacles aux gens curieux de spectacles ; qu’il donnât une juste idée des productions littéraires à ceux qui, en lisant avec choix, veulent s’instruire ou s’amuser ; qu’à la saine et sage partie du public qui s’intéresse aux découvertes des arts utiles, aux progrès des arts salutaires, il fit part de leurs tentatives et des heureux succès de leurs inventions ; qu’aux amateurs des arts