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leurs dupes. Par exemple, ces messieurs ne manquent jamais de relever avec emphase le moindre avantage que remporte leur parti, et ils ont le même soin d’atténuer les bonnes fortunes du parti contraire. Il est vrai qu’ils ne font souvent en cela que suivre la loi qu’on leur impose, et qu’ils sont rarement les maîtres de raconter les événements tels qu’ils arrivent. Peut-être même qu’à peser les choses au poids de la politique, la violence qu’on leur fait sur cet article n’est pas condamnable. Une fausse nouvelle débitée en de certaines circonstances, une nouvelle véritable supprimée pendant vingt-quatre heures, sont souvent le salut d’un grand État, et peuvent être l’origine des intrigues les plus importantes. Croit-on que, s’il y avait eu des gazettes à Rome du temps de Claude, Agrippine eût trouvé bon qu’un gazetier indiscret eût annoncé la mort de cet empereur, et rompu par là les mesures qu’elle prenait pour faire tomber l’empire à son fils ? Non certainement, et elle eût eu raison. Il n’est rien de si raisonnable que cette gêne que les princes imposent aux gazetiers quand c’est pour une fin légitime, et en général il ne serait point à propos de laisser à ces sortes d’écrivains une liberté sans bornes, ni de leur permettre les réflexions hardies plutôt que sensées qui ne leur sont que trop ordinaires en certains pays. L’arrangement de la société demande qu’on les réprime, et l’expérience apprend