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du privilége, et la fondation d’une gazette était entourée de difficultés presque insurmontables. Le métier de gazetier, d’ailleurs, ne semblait pas aussi facile dans ce temps-là qu’aujourd’hui.

« La Gazette, dit Vigneul-Marville (Mélanges d’Histoire et de Littérature, 1700), la Gazette, que la plupart des gens regardent comme une chose de rien, est, à mon gré, un des plus difficiles ouvrages qu’on ait entrepris de nos jours. Il fallait autant de génie et de capacité qu’en avait feu M. Renaudot pour y réussir au point qu’il a fait, dès qu’il a commencé à y mettre la main. Cela demande une connaissance fort étendue de notre langue et de tous ses termes, une grande facilité d’écrire et de narrer nettement, finement et en peu de mots. Il faut savoir parler de la guerre sur mer et sur terre, et ne rien ignorer de ce qui regarde la géographie, l’histoire du temps et celle des familles illustres, la politique, les intérêts des princes, le secret des cours, les mœurs et les coutumes de toutes les nations du monde. Enfin, sans entrer dans un plus grand détail, il faut tant de sortes de connaissances pour bien écrire une gazette, que je ne sais comment on a osé l’entreprendre. Il n’y a qu’une seule chose qui fait tort à celui qui l’écrit, c’est qu’il n’est pas entièrement le maître de son ouvrage, et que, soumis à des ordres supérieurs, il ne peut dire la vérité avec la sincérité qu’exige l’histoire. Si on lui