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est assez ordinaire que les copies soient au dessous des originaux : ainsi Marivaux n’a point renversé l’ordre naturel dans cette partie ; il ne s’est rendu célèbre que par ses pièces de théâtre, qu’on lit encore avec plaisir.

» Un bon Spectateur considère attentivèment tous les objets qui se présentent à lui ; il examine les défauts et les bonnes qualités des hommes, il suit leurs démarches, il pénètre les principes et se sert adroitement des lumières qu’une méditation profonde et une expérience consommée lui ont fait acquérir, pour rendre ses compatriotes plus parfaits, et les corriger des vices ou des ridicules dans lesquels ils ont coutume de tomber.

» Mais il faut que ce Spectateur ait soin d’égayer sa morale par des traits ingénieux et des portraits délicatement touchés, et si ressemblants qu’on ne puisse s’y méconnaître. Il faut qu’il évite de traiter ces matières triviales que tout le monde possède, qui n’ont rien d’intéressant et qui ne sont pas capables d’attacher toutes sortes de lecteurs ; il doit au moins relever ces sujets, s’il lui en tombe de pareils entre les mains, par des réflexions également piquantes et solides, par des tours nouveaux et assez forts pour tirer les hommes de la léthargie profonde où ils vivent. Qu’il évite principalement de monter son discours sur le ton d’un prédicateur, et de confondre dans des corrections également fortes ces