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de la littérature anglaise, était bien vite devenue européenne. Aussi furent-ils traduits et imités dans toutes les langues.

Nous n’avons pas, que je sache, de traduction complète du Spectateur. La plus étendue fut faite à l’époque même ; mais, publiée d’abord en Hollande[1], elle porte l’empreinte de son origine étrangère : ses auteurs semblent avoir absolument méconnu l’esprit de leur modèle et les ressources de l’idiome français. C’est d’ailleurs, je crois, la seule qui ait été tentée sur ces larges bases. On comprit tout d’abord qu’il serait inutile, peut-être même impossible, de faire passer dans notre langue la série entière de ce recueil volumineux. Sans parler des différences de mœurs, des changements apportés par le temps, l’inégalité est un écueil presque inévitable dans toute composition périodique entreprise par une réunion quelconque de gens de lettres. « Quand on a pris l’engagement d’entretenir une voiture publique, dit Steele lui-même, il faut qu’elle parte, qu’il y ait ou non des voyageurs : il en est de même avec nous autres écrivains périodiques. » En Angleterre même, on avait reconnu de bonne heure le besoin de faire un choix, de réunir dans un ordre moins étendu les productions les plus sail-

  1. Sous le titre de le Spectateur français ou le Socrate moderne, traduit de l’anglais, 8 volumes, dont le premier parut à Amsterdam en 1714. Il en fut fait une nouvelle édition à Paris en 1754 et 1755, en 3 vol. in-4o et 9 in-12.