biographe, si seulement on voulait reproduire les
injures atroces que leur auteur a eu le talent d’assaisonner
de tant d’esprit dans sa prose ou de revêtir
d’une poésie si séduisante. Pendant dix ans le nom
de Desfontaines mit Voltaire en fureur, comme fit
plus tard celui de Fréron ; pendant dix ans, abusant
du prodigieux avantage que lui donnait sur
son adversaire la supériorité de son génie, il ne
cessa de le poursuivre de sa haine envenimée ;
prose, vers, préfaces, brochures, romans, poésies,
tout servit son ressentiment, et, pour déshonorer
son ennemi, il ne rougit pas de souiller ses écrits
des plus sales et des plus grossières invectives.
L’aventure de Desfontaines en est toujours le sujet
ou le prétexte. Doit-on croire à la réalité de cette
aventure ? Est-il vrai que Desfontaines ne dut sa liberté
qu’à Voltaire ? Est-il vrai que quinze jours
après être sorti de prison il écrivit un libelle contre
son bienfaiteur ? Tout cela n’est rien moins que
prouvé ; tout cela serait-il vrai, d’ailleurs, que Voltaire
n’en serait pas plus excusable d’avoir attaqué
ce critique dans des termes qui révoltent également
la raison et la pudeur. Nous en avons assez dit, du
reste, pour faire voir que les premiers torts — lit-
littéraires, du même, page 136, une très-curieuse lettre du marquis d’Argenson à Voltaire, au sujet du désaveu, dans laquelle on lit cette phrase, entre autres : « Je semonce mon frère d’ordonner tout de nouveau à M. Maunoir, qui a succédé à L. Trublet pour censurer les Observations, de n’y pas passer la moindre chose qui ait rapport à vous, et cela sera fait » !!