Page:Hatin - Histoire politique et littéraire de la presse en France, tome 2.djvu/328

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Deux autres obstacles encore ont arrêté l’essor de la presse littéraire : le privilége dont jouissait le Journal des Savants, et le peu de liberté accordée aux écrivains.

Rappelons-nous qu’alors on était en tout sous le régime du privilége. À la fin du xviie siècle et dans le xviiie, la Comédie-Française s’opposait tant qu’elle pouvait aux théâtres de la foire, et leur fermait de temps en temps la bouche de peur de concurrence ; l’Académie royale de musique s’opposait aux Italiens et aux théâtres chantants, ou du moins avait sur eux la haute main. Ainsi en était-il dans la république des lettres : quand un jeune littérateur pauvre voulait créer quelque petite feuille de littérature et de critique, il ne le pouvait qu’en contrebande, faute d’avoir de quoi payer 300 francs au Journal des Savants : c’était, comme nous l’avons déjà dit, un tribut qui était dû à ce père et seigneur suzerain des journaux littéraires.

D’un autre côté, on aura remarqué, en parcourant l’esquisse que nous en avons tracée, que la plupart des journaux littéraires avaient été publiés à l’étranger, et principalement en Hollande. Cela s’explique bien un peu par les entraves apportées à la liberté d’écrire, par les difficultés dont les susceptibilités particulières, plus encore que celles du gouvernement, entouraient le métier de journaliste ; mais cela a tenu beaucoup plus aux persécutions reli-