Page:Hatin - Histoire politique et littéraire de la presse en France, tome 2.djvu/204

Cette page a été validée par deux contributeurs.

veau son projet d’article à La Rochefoucauld, lui avouant qu’elle a laissé ce qui lui avait été sensible, mais l’engageant à user de son article comme il lui plairait, à le brûler ou à le corriger à son gré. Ce billet d’envoi, dont on a donné quelques lignes, mérite bien d’être fidèlement reproduit, parce qu’il est joli et qu’il éclaire les ombrages et les petites manœuvres de l’amour-propre de La Rochefoucauld :


Ce 18 février 1665.

Je vous envoie ce que j’ai pu tirer de ma tête pour mettre dans le Journal des Savants. J’y ai mis cet endroit qui vous est le plus sensible, afin que cela vous fasse surmonter la mauvaise honte qui vous fit mettre la préface sans y rien retrancher ; et je n’ai pas craint de le mettre, parce que je suis assurée que vous ne le ferez pas imprimer, quand même le reste vous plairoit. Je vous assure aussi que je vous serai plus obligée si vous en usez comme d’une chose qui seroit à vous, pour le corriger ou pour le jeter au feu, que si vous lui faisiez un honneur qu’il ne mérite pas. Nous autres grands auteurs, nous sommes trop riches pour craindre de rien perdre de nos productions. Mandez-moi ce qu’il vous semble de ce dictum.


» La Rochefoucauld prit au mot madame de Sablé ; il usa très-librement de son article, il supprima les critiques, garda les éloges, et le fit insérer dans le Journal des Savants ainsi amendé et pur de toute prétention à l’impartialité.

» Nous mettons en regard le projet d’article et l’article imprimé, pour qu’on en saisisse mieux les différences :