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truire et d’amuser. En effet, de tous les objets différents qu’elle embrasse aujourd’hui, comme autrefois, et dont l’uniformité seule est bannie, il paraît que la connaissance des livres n’est pas celui qui plaît le moins. Cependant, nous le répétons encore, nous ne prétendons point élever cette feuille au rang des journaux : elle n’en est que l’avant-coureur. Ce nom la définit très-bien, et lui conviendrait uniquement si elle n’était mêlée d’autres matières. Mais elle est faite de façon qu’elle peut tenir lieu des journaux à ceux qui ne les liraient point quand elle ne subsisterait pas, tandis qu’elle peut en exciter d’autres à les consulter pour avoir des mêmes ouvrages dont nous donnons une idée légère des notions plus étendues, plus profondes et mieux digérées. Ainsi, à ne considérer notre feuille que par la partie littéraire, voilà un point d’utilité très-sensible. Et quel spectacle elle offre encore aux yeux d’un lecteur un peu philosophique ! L’Affiche peint en raccourci toutes les vicissitudes humaines. Le tableau de ces mutations perpétuelles que subissent et les biens et les charges dont nous annonçons la vente, en nous retraçant notre condition naturelle, cadre, à ce qu’il nous semble, assez bien avec celui des écrits modernes, qui se succèdent rapidement, qui se poussent comme les flots et les vagues, qui s’effacent et s’engloutissent de même. Qu’il est curieux de contempler cette fermentation de tous les esprits empressés à nous faire part de leurs conceptions, et cette espèce de contagion qui a gagné tous les états, tous les ordres ! On voit les livres, plus nombreux d’année en année, éclore abondamment en toute saison, comme l’herbe des prés croît au printemps, et avoir à peu près la même durée. Telle est toute la nature des choses : leur vie consiste à se reproduire ; sans reproduction point de mouvement ; sans mouvement, une inertie générale enchaînerait toute la matière. Mais, outre la vie productive, qui est commune à tous les esprits et plus ou moins active chez nous, il est une autre sorte de vie qui s’imprime à nos productions, et qui dépend purement d’autrui. C’est en les lisant qu’on vivifie nos ouvrages, il faut qu’ils soient lus pour être vivaces ; et que cette vie est courte encore ! Les livres, dont le poids sur-