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les besoins de son journal, fréquentait beaucoup les nouvellistes, qui, par conséquent, les connaissait parfaitement, en a tracé dans ses premiers numéros une peinture dont nous reproduirons quelques traits :

« Vous avez peut-être ouï parler des nouvellistes, qu’une curiosité qui ne les laisse point en repos, et leur fait souvent négliger leurs propres affaires pour songer à celles des autres, fait assembler en divers lieux publics de Paris, et surtout dans la grande salle du Palais et dans le jardin du Palais-Royal. C’est dans ces deux endroits où les deux plus grands corps de nouvellistes s’assemblent tous les jours, et où la curiosité attire beaucoup plus d’honnêtes gens que d’autres. Vous aurez peut-être d’abord de la peine à croire combien, parmi les fausses nouvelles qui s’y glissent, on y en débite de véritables, et de choses curieuses et spirituelles. J’ai eu longtemps de la peine à le croire avant que d’être devenu membre de ces célèbres corps ; mais enfin j’en ai découvert les raisons. Elles viennent de la diversité des personnes de mérite, d’esprit et de naissance, qui s’y rendent de toutes parts ; et vous devez aisément être persuadé que parmi les nouvelles de tant de gens qui ont de différents emplois et de différents commerces dans le monde, il y en peut avoir beaucoup de curieuses et de véritables. Les uns apportent des lettres de leurs amis, les autres de leurs parents. Les autres ont commerce avec quelques commis des ministres, et les autres avec des gens attachés au service des princes, et qui sont même quelquefois dans leur confidence. Il s’en trouve aussi qui ont des parents auprès des ambassadeurs que le roi a dans les pays étrangers ; et il y en a même qui connaissent ceux des autres souverains qui sont auprès de Sa Majesté, et ceux-là apprennent souvent d’eux beaucoup de choses qu’il serait difficile de savoir par d’autres voies. J’ai vu pendant cette campagne des nouvellistes qui avaient toutes les semaines deux fois des lettres de banquiers de Hollande qui apprenaient des choses fort curieuses, et qui ne