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mœurs en détruisant la philosophie, il dira qu’il faut laisser les romans aux peuples corrompus.

Et il pourra dire aussi qu’il y a des fripons chez les peuples corrompus.

Et on le laissera tirer la conséquence.

Et les philosophes voudront le forcer de se justifier d’avoir fait un livre où respire la vertu.

Et il aura soin de menacer de son mépris tous ceux qui n’estimeront pas son livre.

Et les gens vertueux le liront avec attendrissement.

Et on ne l’appellera plus le Philosophe, et il sera reconnu comme un des plus éloquents et des plus vertueux des hommes.

Et on ne sera point étonné comment, avec une âme pure et honnête, il a fait un livre qui le soit.

Et les philosophes qui l’avaient loué le calomnieront.

Et ceux qui ne croient pas à la vertu trouveront que le livre les ennuie.

Et ceux qui croient en lui y croiront plus que jamais.



MADRIGAL


    Au temps heureux où régnait l’innocence,
On goûtait, en aimant, mille et mille douceurs,
    Et les amants ne faisaient de dépense
        Qu’en soins et qu’en tendres ardeurs.
        Mais aujourd’hui, sans opulence,
        Il faut renoncer aux plaisirs.
Un amant qui ne peut dépenser qu’en soupirs
        N’est plus payé qu’en espérance.

Méré.