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Le lecteur effrayé tourne vite la page,
Et, poursuivant le fil de ce galant ouvrage,
Il tombe sur l’endroit où cent bizarres noms
Semblent un exorcisme à chasser les démons.
Sa crainte alors redouble, et de l’affreux Mercure
Il est prêt à quitter la magique lecture ;
Quand l’énigme paraît. Après bien des frayeurs,
Si pour la deviner il voit quelques lueurs,
Il la relit deux fois, non sans quelque scrupule
Du temps que lui ravit ce labeur ridicule.
Après plusieurs efforts, si le mot ne vient pas,
Le lecteur passe enfin au récit des combats ;
Mais, voyant le Mercure, écho de la Gazette,
Répéter mot pour mot une vieille défaite,
Il maudit de Visé, Corneille et ses consorts,
Et voudrait voir leurs noms dans la liste des morts.


Cette critique est amère ; mais on sait que Gacon mettait peu de retenue dans ses satires, et qu’il n’épargnait même pas les écrivains les plus célèbres. L’auteur des Réflexions sur les défauts d’autrui nous semble avoir mieux jugé l’œuvre de Visé.

« On reproche au Mercure galant, dit-il, d’être un ramas de nouvelles et de pièces différentes, qui courent le monde. Je réponds que, si l’auteur est fidèle dans le ramas qu’il fait de ces nouvelles et de ces pièces, il n’en faut pas davantage : son livre est bon. Si dans ce nombre il se trouve des pièces qui ne méritent pas d’être lues, ne les lisez pas ; ne vous attachez qu’à celles qui sont bonnes, et laissez les autres… L’auteur n’a point prétendu s’ériger en juge ; il s’est proposé de donner ce qui court,