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longtemps sans s’instruire, n’ont pu se résoudre à faire cas d’un livre où les bonnes choses sont comme noyées dans une infinité de mauvaises, où ce qui peut servir de preuve et d’éclaircissement à l’histoire ne se trouve que trop souvent mêlé de circonstances douteuses et équivoques[1]. »

Ce jugement date du commencement du xviiie siècle, d’une époque où le Mercure n’avait encore fourni que la moitié à peine, et la moitié de beaucoup la moins importante, de sa longue carrière. Une saine critique n’en porterait pas un autre aujourd’hui. Je sais bien qu’il est assez de mode de se moquer de ce pauvre Mercure ; on en rit volontiers — souvent sans le connaître ; mais il a pour lui sa longue existence, de près d’un siècle et demi, et sa masse très-respectable de dix-huit cents volumes. Ce sont là, ce me semble, d’assez bonnes preuves, et, quoi qu’on en puisse dire ou penser, il faut bien reconnaître qu’un journal qui a pu fournir une pareille

  1. Camusat, Histoire critique des journaux, Amsterdam, 1734, in-12. M. Ch. de Monseignat (Un chapître de la Révolution française) dit que « cette histoire serait mieux intitulée Histoire de la Gazette de France et du Journal des Savants, parce que ce sont les seuls journaux dont il y soit question. » C’est une erreur que nous croyons devoir signaler, pour épargner des recherches aux travailleurs, que le titre même de ce volume assez rare pourrait induire en erreur. Nous rappellerons que les journaux et les gazettes étaient, à cette époque, deux choses tout à fait distinctes, que les rédacteurs des gazettes étaient des gazetiers, et non des journalistes, titre exclusivement réservé alors aux rédacteurs des recueils littéraires. L’histoire de Camusat n’est, à proprement parler, que l’histoire du Journal des Savants, qui est suivie de courtes notices sur le Mercure et une demi-douzaine de journaux de médecine, de sciences mathématiques, et de littérature. Mais il n’y est pas dit un mot de la Gazette de France ; une note seulement roule sur l’origine des gazettes et l’utilité de ces sortes d’écrits. Nous reviendrons d’ailleurs sur cet ouvrage en parlant des journaux littéraires.