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corps social, une plénitude de sève, une profusion, une infusion d’ardeurs et de doctrines, une matière, enfin, plus que suffisante aux prises de l’esprit. Mais au bout de quelques années à peine tout ce beau feu s’en était allé, les partis étaient désorganisés, et la presse s’éteignait au sein de son triomphe. Alors, sous prétexte de se démocratiser, elle se jeta dans l’industrialisme, et changea en un trafic vulgaire ce qui était une magistrature, presque un sacerdoce. De ce moment le journalisme ne fut plus une affaire de conviction, ne fut plus une puissance, mais une profession, un métier.

Nous étudierons avec tout le soin qu’elle mérite cette prétendue réforme, cette révolution qui promettait tant et de si grands résultats, dans le programme de laquelle il y avait du bon assurément, mais qui, en fin de compte, n’a produit jusqu’ici que la démoralisation et le discrédit du journalisme.


La Révolution de Février, libérale et confiante à l’excès, mit une plume et un fusil dans les mains du premier venu. Si elle enfanta des héros, elle ne fut pas féconde en publicistes, car on ne saurait donner ce nom à ces ridicules pygmées qui croyaient imposer au monde en se couvrant du masque des héros du journalisme de 89. On sait à quoi aboutirent ces saturnales d’une presse sans foi ni loi :