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D’honneur, de gain, ou de vengeance,
Les bons et les mauvais auteurs
Donnent matière aux imprimeurs,
C’est ce que je ne puis bien dire.
Je sais bien qu’on en voit écrire
Quelques-uns par ressentiment,
Et d’autres par émolument ;
Et, comme chacun veut repaître,
Le valet qui n’a plus de maître
Ne voit point de plus prompt métier
Que de débiter le cayer[1].


Ce qui paraît certain, c’est que le métier de colporteur valait souvent mieux que celui d’écrivain, et l’on ne s’étonnera pas que plus d’un auteur ait quitté la plume pour le panier. On trouvait, du reste, des pamphlets et des journaux dans les boutiques, chez les apothicaires ; ils se vendaient dans les théâtres, et même aux portes des églises ; mais le principal commerce s’en faisait sur le Pont-Neuf, autour de la Samaritaine, qui était devenue « la bibliothèque commune de tout Paris, » dit un pamphlet de 1649[2]. Il y avait en outre une

  1. Lettre à monsieur le Cardinal burlesque (4 mars 1649). Naudé met cette lettre au-dessus des pièces burlesques de Scarron. Elle est de l’abbé de Laffémas, fils d’Isaac de Laffémas.
  2. Le Pont-Neuf était couvert de libraires étalagistes, qui eurent souvent maille à partir avec les libraires en boutique. « Il y a ici un plaisant procès, dit Guy Patin dans une lettre du 15 septembre 1650. Le syndic a obtenu un nouvel arrêt, après environ trente autres, par lequel il est défendu à qui que ce soit de vendre ou d’étaler des livres sur le Pont-Neuf. Il l’a fait publier et a fait quitter la place à environ cinquante libraires qui y étaient, lesquels sollicitent pour y rentrer, et enfin ils ont obtenu un terme de trois mois, afin que durant ce temps-là ils puissent trouver des boutiques. » On trouve dans les Mazarinades une Requête des marchands libraires du Pont-Neuf présentée à nos seigneurs de la Basoche, en vers burlesques, composée à cette occasion.