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« Les grands ne nous paraissent grands que parce que nous sommes à genoux… Levons-nous ! »

On peut juger par là de la confusion dans laquelle étaient tombés les esprits en 1652. La Fronde était aux abois.

Il ne faudrait pas croire que le parti de la Cour soit demeuré sans réplique. Dès les premiers jours Mazarin avait manifesté l’intention d’accepter la lutte avec la Fronde sur le terrain de la publicité, et d’opposer aux pamphlétaires ses écrivains à lui. On lit dans un de ses agendas[1] qui sont parvenus jusqu’à nous cette note, remontant à 1648 : « Court un livre en latin contre moy dont la conclusion est que je m’entends avec le Turc, et que absolument je lui délivreré l’Europe, si on me laysse faire, etc. Le vray moyen pour dissiper toutes ces méchancetez, ce serait de faire un livre dans lequel on dit contre moy tout ce qui peut tomber dans l’esprit de plus méchant, afin que, etc. » Cet etc., qui forme la conclusion de plusieurs notes des agendas, est facile à interpréter : l’exagération des calomnies

  1. Au XVIIe siècle on avait conservé l’usage des tablettes portatives, carnets de poche ou agendas, comme les appelle le Cardinal : « Oultre ce que j’écrivis déjà dans ma dernière agenda. » La Bibliothèque impériale possède seize de ces agendas de Mazarin, qui sont un véritable trésor. Ces petits carnets, mémento de chaque jour, souvenir de tous les instants, sont écrits entièrement de la main du Cardinal, par courts alinéas, par mentions rapides, d’une ligne, d’un mot, tracés ici à l’encre, là au crayon, tantôt en italien, tantôt en français, et souvent en espagnol, pour être mieux compris de la reine, entre les mains de laquelle ont été, sans aucun doute, tous ces petits livrets, qui lui sortaient de guide et de conseiller.