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Les pièces burlesques sont, d’ailleurs, infiniment supérieures aux autres par la forme ; quant au fond, l’on comprend avec quelle réserve il les faut accueillir. Le burlesque ne se pique pas d’exactitude, de raison ou de justice ; son rôle, son but, a été surtout de provoquer le rire par l’ironie, par le sarcasme, par l’invective. Il ne juge pas, il ne raconte pas même ; il raille, il veut être plaisant, spirituel, et il y réussit souvent. Il a des saillies ingénieuses, des boutades piquantes, des railleries fines ; il a même rencontré quelques éclairs de passion dans l’audacieux cynisme de ses insolences. Mais son sel est d’ordinaire fort gros ; le nom qu’il porte dit assez qu’il n’a souci ni de la délicatesse, ni de la mesure, ni de la convenance, et souvent, dans les mots comme dans les pensées, il brave l’honnêteté. Son excuse est dans des habitudes de langage qu’il a reçues, qu’il n’a point faites, dans l’état d’une civilisation qui tenait beaucoup au fond, mais peu à la forme, enfin dans la facilité avec laquelle il jetait au vent de la curiosité ses compositions, destinées à disparaître avec les opinions et les circonstances qu’elles avaient pour objet de servir[1]

  1. Pélisson, dans son Histoire de l’Académie, déplore cette invasion du genre burlesque, qui nous vint d’Italie : « Non-seulement le burlesque passa en France, mais il y déborda et il y fit d’étranges ravages. Chacun s’en croyait capable, depuis les dames et les seigneurs de la cour, jusqu’aux femmes de chambre et aux valets. Cette fureur de burlesque était venue si avant, que les libraires ne voulaient rien qui ne portât ce nom, que, par ignorance ou pour mieux débiter leur