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ques-uns de son cru, de sa rédaction propre. Voilà un assez bel idéal de plan, ce semble. L’Esprit des Journaux le remplissait très-bien. Que n’y ai-je pas retrouvé, dans le petit nombre d’années que j’en ai parcourues ! Nous allons oubliant et refaisant incessamment les mêmes choses. Cette toile de Pénélope, dans la science et la philosophie, amuse les amants de l’humanité, qui s’imaginent toujours que le soleil ne s’est jamais levé si beau que ce matin-là, et que ce sera pour ce soir à coup sûr le triomphe de leur rêve. Savez-vous qu’on était fort en train de connaître l’Allemagne en France avant 89 ? Bonneville et d’autres nous en traduisaient le théâtre ; cette Hrosvitha, si à propos ressuscitée par M. Magnin, était nommée et mentionnée déjà en plus d’un endroit. Sans l’interruption de 89, on allait graduellement tout embrasser de l’Allemagne, depuis Hrosvitha jusqu’à Goethe. Les poésies anglaises nous arrivaient en droite ligne ; les premiers poëmes de Crabbe étaient à l’instant analysés, traduits. Savoir en détail ces petits faits, cela donne un corps vraiment à bien des colères de La Harpe, aux épigrammes de Fontanes. L’Allemagne de madame de Staël n’en est pas moins un brillant assaut, pour avoir été précédée, avant 89, de toutes ces fascines jetées dans le fossé. Mon Esprit des Journaux me rendait sur Buffon[1] des dépositions

  1. Juin et juillet 1788.