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passé nous serve de leçon ; profitons des sottises que nous avons faites pour ne plus en faite par la suite. Plus de grâce à des coquins que nous avons trop long-temps ménagés, qui ne nous en feraient pas s’ils avaient un seul instant le grappin sur nous. Le combat à mort entre les hommes du peuple et les ennemis du peuple est engagé ; il ne peut finir que lorsque l’un des deux côtés aura anéanti l’autre… »

La pensée exprimée dans ces lignes, le Père Duchesne y revient plusieurs fois.

— « Si, dès le 14 juillet, dit-il ailleurs, vous aviez fait main basse sur vos ennemis, vous seriez maintenant libres et heureux. »

Il n’était pas le seul, du reste, qui pensàt ainsi : Marat, dès le 26 juillet 1790, avait énoncé la même opinion dans son pamphlet si fameux intitulé : C’en est fait de nous. — « Cinq à six cents têtes abattues vous eussent assure le repos, la liberté, le bonheur ; une fausse sécurité a retenuvos bras et suspendu vos coups : elle va coûter la, vie à un million de vos frères. » Cette provocation avait soulevé presque toute la presse contre Marat ; Brisset le traita d’énergumène.

— « Monsieur Marat, lui disait Camille Désmoulins dans les Révolutions de France et de Brabant, vous vous ferez de mauvaises affaires. Cinq à six cents têtes abattues ! Vous êtes le dramaturge des journalistes. Les Danaïdes, les Bramécides, ne sont rien en comparaison de vos tragédies. Vous égorgeriez tous les personnages de la pièce, et jusqu’au souffleur… » — « Je ne finirai pas, disait le Père Duchesne de Lemaire, sans donner un coup de gueule à Marat. C’est un vrai chien, trop sanguinaire. Il aurait mieux fait d’être boucher qu’écrivain. Il voudrait faire assassiner le genre humain. Un conseiller pareil est bon à conduire des chiens au