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elle trouvait d’ailleurs dans les reproches adressés à la nouvelle presse une sorte de prétexte, dont elle ne pouvait manquer de s’armer.

Ce fut l’Époque, de bruyante mémoire, qui leva l’étendard de la concurrence, en juillet 1845 ; mais comme l’Époque ne raisonnait guère qu’à coups de chiffres, — et quels chiffres ! — c’est au prospectus d’un autre journal, du Soleil, que nous demanderons la raison d’être des astres nouveaux qui se levèrent alors à l’horizon du journalisme.

Mais, pour déblayer d’autant le terrain, disons tout de suite ce que c’était que le Soleil, ou plutôt ce qu’il devait être. Le Soleil était une nouvelle incarnation de M. Dutacq, qui, dépossédé de la gérance du Siècle en 1841, était à la recherche d’une affaire quand parut le prospectus de l’Époque. Voyant que le public mordait à l’hameçon, il résolut de renouveler en 1845 ce qui lui avait si bien réussi en 1836 à l’encontre de la Presse ; il essaya de fonder une feuille rivale, dont le prospectus parut au mois de septembre, trois mois après celui de l’Époque, circonstance qui nous porterait à croire que c’est à tort que la chronique fait honneur à M. Dutacq de l’idée du journal encyclopédique. Quoi qu’il en soit, le prospectus du Soleil, parfaitement conçu, parfaitement écrit (l’auteur, croyons-nous, était une notabilité du barreau), dont nous avons reproduit en partie les arguments, faisait espérer un excellent journal, s’il eût tenu toutes ses promesses. Mais les fondateurs de l’Époque parurent s’émouvoir de cette concurrence ; des pourparlers eurent lieu, et le Soleil rentra dans le néant.

Les journaux politiques, disait le prospectus du Soleil, dans les conditions matérielles où ils sont aujourd’hui placés, ne peuvent plus suffire à la par-