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détails curieux pour l’histoire de la presse en France ; nous en extrairons quelques faits propres à jeter une vive lumière sur le mouvement de la littérature à cette époque, et qui confirmeront, en outre, ce que nous disions tout à l’heure de l’origine de la presse à bon marché.

Jusque là le prix élevé des journaux en avait fait comme un objet de luxe, et le peuple, qui ne pouvait prélever 80 fr. sur son salaire annuel, était pour ainsi dire hors du journalisme. La publicité de la presse était, par conséquent, fort restreinte. « Les journaux, écrivait M. de Cormenin, sont une marchandise trop chère : c’est la presse à bon marché qui seule peut traverser l’opacité des masses et achever l’éducation constitutionnelle du peuple… Il faut des journaux à bon marché qui sillonnent la France dans tous les sens, et qui, dans leur appareil agricole, industriel, commercial, scientifique et politique, visitent chaumières, ateliers et métairies, écoles, presbytères et châteaux, sous toutes les formes et au plus bas prix. » — « Les journaux, disait Benjamin Constant, doivent être le livre de ceux qui n’en ont pas, le livre que tout le monde lit d’un bout à l’autre ; chaque homme, en France, depuis le mendiant sans asile jusqu’au roi dans son palais, ayant des droits que la loi consacre et protége. » M. Guizot, alors ministre de l’intérieur, s’exprimait de même, en 1830, sur le rôle que la presse périodique pourrait remplir quand des journaux bien adaptés à leur destination seraient en usage dans les campagnes. « C’est ainsi, disait-il, qu’en mettant les idées en circulation en présence des masses de lecteurs, et donnant aussi au pouvoir des conseils par la critique qu’elle émet, par l’accueil qu’elle fait à toutes les doctrines, la presse périodique est destinée à s’intro-