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tutionnel, de Journal du Commerce. Ce ne fut qu’en 1819 qu’il prit, pour ne plus le quitter, le nom qu’il porte aujourd’hui.

La liberté de la presse avait été reconnue, mais on comprend combien devait être ombrageuse la police de la nouvelle royauté. On en jugera par ce fait :

Une exposition de peinture avait lieu au Louvre. Le rédacteur de l’Indépendant chargé d’en rendre compte avait été vivement impressionné par le portrait d’un jeune enfant qui tenait à la main un bouquet de fleurs bleues. Son imagination l’emportant, il en fait une description animée. Le lendemain la foule se porte pour voir ce portrait. On s’interroge, on se demande quels traits il représente, que signifient ces fleurs bleues. Un spectateur explique qu’en allemand ces fleurs veulent dire : Ne m’oubliez pas. Ces mots ont personnifié le portrait ; plus de doute possible. « C’est le roi de Rome ! », s’écrie-t-on de tous côtés. Le monde s’agite, la police fait évacuer la salle, et le lendemain l’Indépendant est supprimé. Or, vérification faite, ce portrait était celui du fils d’un conseiller d’ambassade de la cour de Bavière. Disons que quelques jours après. Louis XVIII, ému de l’injustice qui avait frappé cette feuille, qu’il se plaisait à lire, fit donner à ses propriétaires un nouveau privilége, et, si l’on en croit M. Beaudoin, un des fondateurs et le premier imprimeur du Constitutionnel, à qui nous empruntons cette anecdote, ce serait Louis XVIII lui-même qui aurait ainsi baptisé le nouveau journal. Quoi qu’il en soit, ce titre était admirable pour le moment où il fut choisi.

En dépit de ces tracasseries, peut-être même en raison de ces tracasseries, la fortune du Constitutionnel fut rapide, prodigieuse. Elle tint à des causes de diverse nature. En 1815, M. Carnot, étant minis-