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spéciale et au caractère semi-officiel que lui faisaient les communications dont il avait le privilége ; grâce aussi, il faut le dire avec M. Nettement, à ce culte de l’intelligence qui lui est propre, et qui lui fait chercher le talent partout où il est pour l’appeler à lui. Le personnel de sa rédaction, dans les diverses phases de son histoire, a été le plus souvent un catalogue de célébrités. Il a compté parmi ses coopérateurs Geoffroy, Hoffmann, Feletz, Dussault et Malte-Brun, qui datent de sa fondation ; Fiévée, Étienne ; puis, sous la restauration, MM. de Châteaubriand, Villemain, Nodier, Duvicquet, Becquet, Salvandy, etc.

Cette influence, écrivions-nous en 1846, le Journal des Débats la doit encore à son organisation toute particulière, organisation telle, qu’il ne peut se faire le plus petit mouvement dans les affaires sans qu’il en soit averti, car il a la main sur toutes les touches de la politique ; il est partout représenté, à la chambre des pairs, à la chambre des députés, au ministère, au château, dans les chaires d’enseignement, dans les ambassades, dans les préfectures. Il se sert de son influence comme journal dans l’intérêt de la fortune politique des hommes qui se lient à ses destinées ; il se sert ensuite de la fortune politique de ces hommes dans son propre intérêt. On comprend les avantages que les Débats retirent de cette espèce d’assurance mutuelle. Ce journal ressemble à une maison qui a pignon sur deux rues : l’influence qu’il a dans les affaires lui donne de l’importance dans la presse, et l’importance qu’il a dans la presse augmente son influence dans les affaires. Sa tactique consiste à s’imposer à la fois au pouvoir par l’ascendant qu’il exerce sur le public, et au public par l’ascendant qu’il exerce sur le pouvoir. Toute sa fortune