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— Je vous déclare avec obéissance que je suis rhumatisant, mais que je veux tout faire pour notre Empereur, quand je devrais y laisser ma peau, répondit Chvéïk avec modestie ; j’ai aussi les genoux enflés.

Bautze jeta un regard terrible sur le brave soldat Chvéïk et hurla : « Sie sind ein Simulant ![1] » Puis, s’adressant au sergent, il ajouta d’un ton glacial : « Den Kerl sogleich einsperren ![2] »

Baïonnette au canon, deux soldats s’emparèrent de Chvéïk pour le conduire à la prison centrale de la place de Prague.

Chvéïk s’appuyant sur ses béquilles, s’aperçut avec horreur que son rhumatisme disparaissait à vue d’œil.

Voyant Chvéïk escorté par des soldats avec baïonnette, la bonne Mme  Muller qui l’attendait avec sa voiture au haut de l’escalier qui descendait dans l’île des Tireurs, éclata en sanglots et lâcha le véhicule pour ne jamais plus s’en occuper.

Pendant ce temps-là, Chvéïk avançait d’un pas modeste, encadré par deux défenseurs de l’État, en armes.

Les baïonnettes reflétaient les rayons du soleil. Passant par Mala Strana, Chvéïk, arrivé devant le monument du maréchal Radetzky, se tourna vers la foule qui marchait toujours derrière lui et cria :

— À Belgrade ! À Belgrade !

Du haut de son monument, le maréchal Radetzky suivait, d’un regard rêveur, le brave soldat Chvéïk s’éloignant, son bouquet de recrue piqué sur sa veste, en boitant un peu, tandis qu’un monsieur à l’air sérieux expliquait aux badauds d’alentour qu’on emmenait un déserteur…

  1. Vous êtes un simulateur.
  2. Au bloc, ce type et illico !