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— M’sieur le patron, je vous en supplie au nom de tout ce que vous avez de plus cher au monde, finissez ! sanglotait la logeuse dans la cuisine. Mais déjà M. Chvéïk achevait son chant guerrier :

Les voitures pleines de pèze et les filles qui vous aiment !
Aucun régiment ne vaut le dix-huitième,
Hop, hop, hop !

D’un geste égaré Mme  Muller poussa la porte et courut à la recherche d’un médecin. Elle revint une heure après. Pendant son absence, Chvéïk s’était endormi.

Un monsieur corpulent le réveilla. Il tint un instant la main de Chvéïk dans la sienne et dit :

— Ne vous inquiétez pas, je suis le docteur Pavek de Vinohrady… faites voir votre main, là…, mettez-vous ce thermomètre sous le bras… Bien, tirez la langue… encore… ne la rentrez pas… Monsieur votre père et madame votre mère sont-ils morts et de quoi ?

Et c’est ainsi qu’à une époque où Vienne désirait voir toutes les nations d’Autriche-Hongrie donner les exemples les plus brillants de dévoûment et de loyalisme, le docteur Pavek prescrivait à Chvéïk du bromure pour modérer son enthousiasme patriotique et recommandait à ce vaillant soldat de ne pas penser au service militaire :

— Restez couché et ne vous agitez pas, je repasserai demain.

Le lendemain, le docteur s’arrêta dans la cuisine et demanda à Mme  Muller comment se portait M. Chvéïk.

— C’est de pire en pire, M’sieur le docteur, répondit