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à la taverne et que, du reste, la politique était bonne pour les enfants.

Bretschneider fit montre d’opinions plus révolutionnaires et dit que les États faibles étaient destinés à disparaître. Il demanda à Chvéïk ce qu’il en pensait.

Chvéïk déclara qu’il n’avait été, jusqu’à présent, en aucune relation directe avec l’État, mais qu’il avait soigné dans le temps un Saint-Bernard qu’il avait nourri avec des biscuits de soldats et que le chiot en avait crevé.

À la sixième tournée Bretschneider se déclara anarchiste et demanda à Chvéïk s’il pouvait lui recommander une organisation anarchiste pour s’y faire inscrire dès le lendemain.

Chvéïk répondit qu’en fait d’anarchistes il en connaissait un seul qui lui avait acheté une fois un « léonberg » pour cent couronnes, en oubliant de faire le dernier paiement.

À la septième tournée, Bretschneider prononça tout un discours sur la révolution et contre la mobilisation. Chvéïk se pencha vers lui et dit :

— Voici un client qui entre ; faites attention qu’il ne vous entende pas, vous pourriez avoir des embêtements. Vous voyez bien que la patronne pleure.

En effet, Mme  Palivec, assise derrière son comptoir, pleurait sans cesse.

— Pourquoi pleurez-vous, M’ame la patronne ? fit Bretschneider ; dans trois mois, la guerre sera gagnée, le patron reviendra à la maison et vous pensez quelles tournées on prendra à sa santé. Ou bien croyez-vous, ajouta-t-il en se tournant vers Chvéïk, que nous allons la perdre, cette guerre ?