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pareille arrive pour la première fois dans sa vie », gémit-il.

— Il est scout, votre gosse ? s’exclama Chvéïk, j’aime beaucoup d’entendre parler des scouts, moi. Une fois à Mydlovary près de Zliva, chef-lieu Hluboka, département Ceské Boudeïovice – nous autres, le quatre-vingt-onzième de ligne, on y avait justement été en manœuvres – les paysans de la région ont organisé une chasse aux scouts qui étaient alors en foule dans le bois communal. Ils en ont attrapé trois. Le plus petit, pendant qu’on lui liait les mains, faisait un raffût à vous fendre le cœur : il criait, il se débattait et pleurait que nous autres, soldats et durs-à-cuire, fallait nous en aller pour ne pas voir ça. Dans cette affaire-là, trois scouts ont mordu huit paysans. À la mairie, où on les a conduits après, ils ont avoué à force de coups de bâton qu’il n’y avait pas une seule prairie dans le pays qu’ils n’avaient pas écrasée en se chauffant au soleil, et puis que le champ de seigle près de Ragice avait été dévoré par le feu tout à fait par hasard quand ils y faisaient rôtir à la scout un chevreau qu’ils avaient tué à coups de couteau dans le bois communal. Dans leur repaire au milieu des bois on a trouvé un demi-quintal d’os de volaille et de gibier de toutes sortes, des tas énormes de noyaux de cerises, des masses de trognons, des pommes vertes, et bien d’autres dégâts.

Mais le père du scout ne se laissait pas distraire.

— Je suis un criminel, pleurnichait-il, ma réputation est détruite.

— Bien sûr, dit Chvéïk avec sa franchise coutumière, après ce qui s’est passé, elle est évidemment