Page:Hasek-Le brave soldat chveik,1948.djvu/301

Cette page n’a pas encore été corrigée

— Lui ? Mais il est foutu. Il fait sous lui et on lui donne à manger comme à un bébé. L’autre jour, un monsieur racontait au restaurant que l’empereur avait deux nourrices qui lui donnaient le sein trois fois par jour.

— Il est grand temps, vieux, qu’on nous mette en compote pour que l’Autriche attrape la fessée qu’elle mérite, et se tienne enfin à sa place.

Les deux soldats conversaient ainsi, et Chvéïk résuma le verdict sur l’Autriche par ces paroles :

— Une monarchie si bête que ça ne devrait même pas exister.

L’autre, pour compléter ce jugement un peu général, ajouta :

— Au front, à la première occasion, je les mets pour passer à l’ennemi.

L’entretien qui exprimait bien l’opinion générale des Tchèques sur la guerre où s’était aventuré l’Empire, prit une autre tournure.

Le collègue de Chvéïk lui confia qu’on racontait à Prague qu’à Nachod on entendait le canon et que le tzar ferait bientôt son entrée à Cracovie.

Ils parlèrent des blés tchèques livrés à l’Allemagne et de la profusion de cigarettes et de chocolat dont jouissaient les soldats allemands.

Ils évoquèrent ensuite les mœurs guerrières des temps anciens, et Chvéïk entreprit de prouver qu’à l’époque où l’ennemi lançait sur un château assiégé des pots de m… en guise d’obus, ses défenseurs ne devaient pas être plus à la noce que les soldats d’aujourd’hui. Il avait lu quelque part qu’un certain château ayant résisté pendant trois ans, les assiégeants n’avaient pas passé un seul