Page:Hasek-Le brave soldat chveik,1948.djvu/298

Cette page n’a pas encore été corrigée

— Ce chien, mon colonel… tenta de riposter le lieutenant Lucas.

— … m’appartient, lieutenant, acheva le colonel. C’est mon « Lux » !

Ici « Lux » alias « Max », pour faire voir qu’il n’avait pas oublié son ancien maître et que son nouveau maître ne tenait plus aucune place dans son cœur, s’échappa et se mit à bondir autour du colonel, joyeux comme un collégien amoureux qui se voit exaucé par sa belle.

— Promener des chiens volés, lieutenant, n’est pas compatible avec l’honneur militaire. Saviez pas ? Un officier n’a pas le droit d’acheter un chien sans s’être assuré que cet achat est sans danger pour lui.

Le colonel Kraus caressait Lux-Max qui marquait sa rancune envers son possesseur éphémère en grondant et en montrant ses dents, comme si son maître lui avait désigné le lieutenant avec l’ordre : « Mords-le ! »

— Dites, lieutenant, est-ce que vous croiriez correct de monter un cheval volé ? Non, n’est-ce pas ? Alors vous n’avez pas lu mes annonces de la Bohemia et du Prager Tagblatt, par lesquelles j’ai recherché mon griffon d’écurie ? Vous n’avez pas lu l’annonce que votre supérieur a fait paraître dans le journal ?

Il leva les bras au ciel :

— Ils sont inouïs, ces jeunes officiers… Et la discipline, qu’en faites-vous, dites’ ? Le colonel met des annonces et le lieutenant s’abstient de les lire tout simplement !

— Si je pouvais, vieux tableau, je te ficherais volontiers une paire de gifles, pensa le lieutenant Lucas