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comme il dresse ses oreilles. Debout Max !

L’infortuné griffon, dépouillé et de son foyer et de son nom se leva et attendit.

— Détachons-le pour voir ce qu’il va faire, décida Chvéïk.

Libre, il marcha vers la porte où il fit trois courts aboiements, se fiant, sans doute, pour être délivré, à la générosité de ses persécuteurs. Mais comme ils restaient inexorables, il s’avisa de faire une petite mare près de la porte, persuadé qu’elle allait enfin s’ouvrir. Il se rappelait que, quand il était tout petit, le colonel, féru de discipline, lui inculquait les notions élémentaires de la propreté en l’expulsant de la chambre après chaque oubli.

Chvéïk observa simplement :

— Tu vois ce qu’il est malin, ce petit bout de jésuite.

Et il lui donna un coup avec sa ceinture, en lui fourrant si bien le museau dans la mare, que, pendant un quart d’heure, il dut se lécher pour se nettoyer.

Humilié, l’ex-« Lux » pleurnichait et courait à travers la cuisine, reniflant avec désespoir ses propres traces. Tout à coup, il revint vers la table, dévora sombrement le foie qui traînait par terre, se coucha près du fourneau et s’assoupit enfin.

— Qu’est-ce que je te dois ? demanda Chvéïk à Blahnik quand celui-ci voulut s’en aller.

— C’est pas la peine d’en parler, Chvéïk, dit gentiment Blahnik ; je ferais tout pour un vieux camarade comme toi, surtout que tu fais ton service militaire. Je te dis au revoir, mais fais attention