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très fidèle – disent les livres de lecture pour les écoliers, et les traités d’histoire naturelle. Mais faites sentir à un chien, même le plus attaché à son maître, un bout de saucisson de cheval, et il est perdu. Il oublie immédiatement la présence du maître qui marche à côté de lui, se retourne délibérément vers le saucisson tentateur. Il en bave, il renifle avec volupté cette odeur délicieuse, et remue la queue en attendant qu’on lui jette sa proie.

À Mala Strana, au bas de l’escalier qui monte au château du Hradcany, se trouve une petite taverne populaire. Ce jour-là, deux hommes étaient assis au fond de la salle, dans un coin sombre : un militaire et un civil. Mystérieux, les têtes penchées, ils se parlaient tout bas, semblables à des conspirateurs de la République vénitienne.

— Tous les jours vers huit heures, disait le civil, la boniche le promène au coin de la place Havlicek, en face du parc. Tu sais que c’est une bête qui mord à droite et à gauche. Rien à faire pour le caresser.

Et se penchant encore davantage vers le soldat, le civil lui souffla à l’oreille :

— Il n’aime même pas la saucisse.

— Et la saucisse grillée ?

— Non plus.

Les deux hommes crachèrent.

— Et qu’est-ce qu’il bouffe alors, ce fils de garce ?

— J’sais pas moi. Il y a des clebs qui sont gâtés et gavés comme un archevêque.

Le soldat et le civil trinquèrent et le civil continua :

— Une fois, j’avais besoin d’un loulou de Poméranie,